Crispin de PASSE : Discordia [Le Foyer dissolu] - 1589

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 Crispin de PASSE : Discordia - Verso - Sarah Sauvin

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Burin gravé d’après Martin de Vos, 225 x 240 mm. Hollstein 613, Franken 1212.

Très belle épreuve imprimée sur papier vergé filigrané (filigrane illisible). Nombreux essais à la plume au verso (non visibles au recto). Une tache jaune dans le bas de la feuille.

Dans une belle demeure, tous les membres d’une famille se sont levés de table et se battent deux à deux, renversant les chaises, la vaisselle et les victuailles. Au premier plan, le maître et la maîtresse de maison se donnent des coups de pieds et de poings, la femme s’apprête à frapper de sa châtelaine lourde de clefs son mari armé d’un couteau de table. À l’arrière-plan, la sœur tente d’arracher l’œil de son frère qui lui assène des coups de poings, une autre sœur déverse le contenu d’un grand verre dans le cou de son frère, tandis que le benjamin profite du chaos pour dévorer un poulet, imité par le chat. Un petit chien participe à la bataille en mordant la robe de sa maîtresse. À l’arrière-plan, un domestique alerté par le vacarme sort précipitamment de la cuisine pour voir ce qui se passe.

Discordia  est le pendant de Concordia (Hollstein 612) qui représente une famille pieuse et paisible assise à table dans un intérieur sobre et ordonné. Tous vivent en harmonie sous les tables de la Loi.

Quand il grave Discordia en 1589, Crispijn de Passe a 25 ans et vient d’être contraint de quitter Anvers, comme l’explique Ilja M. Veldman : « étant mennonite, il dut quitter la ville après qu’elle fut repassée sous domination espagnole. Il s’installa à Cologne en 1589, où il se mit à son compte comme éditeur d’estampes. » (Crispijn de Passe, p. 13, traduit par nous)

Ilja M. Veldman voit dans Concordia et Discordia un écho à cette situation politique et religieuse : « Les inscriptions sur les gravures de 1589 Concordia et Discordia gravées par Crispin de Passe d’après les dessins de Martin de Voos montrent très clairement qu’il en avait assez de la guerre et recherchait un lieu paisible pour poursuivre son travail. » (Crispijn de Passe, p. 39, traduit par nous). Si les vers gravés en pied opposent simplement la sobriété aux richesses (De peu vault mieux La Jouissance / Que par mesure Outrecuidance), la légende latine se rapporte en effet directement par contre à la situation politique : belli sed rabies, quicquid pax alma ministrat, diripit, invertit, cunctaque caede replet : « Mais la rage de la guerre saccage et ruine les bienfaits qu’apporte la paix et répand partout le carnage. » (traduit par nous). Crispin de Passe devra cependant fuir Cologne pour Utrecht en 1611.

Références : Daniel Franken : L’œuvre gravé des van de Passe […] avec un supplément d’additions et de corrections par Simon Laschitzer, 1975 ; Ilja M. Veldman : Crispijn de Passe and his Progeny (1564-1670) A century of Print Production, 2001.